Ah les crococos…

On rentre dans l’agence de location de Darwin pour récupérer notre rutilante automobile du mois à venir. Mais il y a un petit problème : elle n’est pas encore tout à fait prête et il faut que l’hôtesse comble l’attente. « Qui est le plus fort entre un crocodile et un requin ?» nous demande-t-elle. Il n’y a qu’à Darwin qu’on peut poser ce genre de question insensée. « Ici les deux carnivores luttent pour le même territoire. Tout le monde connait Brutus, un croco qui s’est fait manger la patte avant par un requin il y a longtemps. Il a pris son mal en patience, attendant le bon moment, et un jour, on l’a vu dans la rivière Adélaide avec un requin entre ses dents. Il l’a eue sa revanche !».

Dans le Top End, tout tourne autour des crocodiles et les crocodiles tournent autour des hommes.

Il y a les crocodiles d’eau douce – les freshies – qui bullent dans les rivières et les marais ; et les crocodiles d’eau de mer – les salties – qui rôdent le long des plages. De ces deux frères, le dernier a définitivement pris le dessus. Non seulement il a mangé toute la nourriture étant petit pour atteindre les 6m de long (quand son frérot d’eau douce rachitique approche difficilement les 3m) mais en plus, il conteste sans relâche le partage des eaux de ses parents et s’incruste à l’envie dans la rivière de son prochain. Et si un humain a le malheur de commenter négativement cette colonisation maritime, l’addition peut s’avérer salée et coûter un bras.

Pendant des années les aborigènes, aventuriers et fermiers de la région ont traqué le croco, autant pour des raisons économiques que de sécurité, faisant progressivement réduire leur nombre à peau de chagrin (environ 3 000 salties). Le musée de Darwin expose d’ailleurs fièrement une réplique taille réelle de Sweetheart, mastodonte dont la capture a été épique, comme nous l’explique le petit documentaire à côté.

Devant cet état alarmant, le gouvernement a finalement déclaré en 1971 les deux espèces protégées et ils ont rapidement repris leurs marques dans tout le Top End.  La routine pour ces créatures venues du fin fond des âges.

Aujourd’hui, ils sont devenus un des piliers économiques de la région, déclinés à toutes les sauces : parc d’attraction autour du crocodile, nems de crocodiles, croisière à la recherche de crocodile, fermes d’élevage de crocodiles, etc. Le tout accompagné de la petite anecdote qui va bien et saura faire pâlir les plus coriaces.

En parallèle de la protection animalière, un programme de sécurité des locaux et touristes face aux méfaits de ces prédateurs à grandes mâchoires a été mis en place. Il faut dire qu’après quelques crocs d’humains près des villes, il fallait réagir… Chaque point d’eau est désormais flanqué d’une petite pancarte annonçant le niveau de danger potentiel sur l’échelle de la dangerosité reptilienne. Sur le terrain, des rangers comptent et recomptent les crocodiles avant d’ouvrir les différentes baignades des parcs nationaux.

Et enfin, l’éducation des plus jeunes n’a pas été oubliée avec la réalisation d’un clip « Be Crocwise » (ainsi que sa version en créole australien !) qui leur apprend à se méfier des crocodiles dans la joie et la bonne humeur. On retiendra surtout les têtes décapitées et sanguinolentes des enfants, pour l’exemple, ainsi que celle de la grand-mère qui n’avait rien fait de mal. On ne rigole pas dans le Northern Territory.

2 commentaires Ajoutez le votre

  1. airoz53 dit :

    Ces histoires de crocodiles, c’est le début de votre périple, non? Pourquoi maintenant ? Sinon toujours aussi bien écrit. So long & kisses.
    DAD.

  2. francis dit :

    Trop drôle la vidéo. Ça donne envie d’aller danser avec les crocodiles. Ça a quand même plus de gueule que les vidéos colgate contre les carries qu’on avait dans le temps… Ca rigole bien. Super tcho. Francis.

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